2. Pour guérir

La justice transformatrice favorise la réparation des dommages et la guérison des blessures, y compris celles qui précèdent souvent la situation de violence à l’origine du processus. Toutes les personnes impliquées peuvent ainsi entamer un chemin de guérison. La reconnaissance de la violence vécue par chacun-e participe à ce processus, tant pour les individus que pour la communauté. Il en va de même pour les actes de responsabilisation comme les excuses, la réparation et la compensation. Dans la justice transformatrice, l’empathie, la compassion et la capacité à reconnaître les souffrances et les besoins de chacun-e sont encouragées pour avancer ensemble vers la guérison et la transformation. 

Bien sûr, la guérison ne peut commencer tant que la violence persiste. Elle implique un processus de réparation et de rétablissement, qui ne peut avoir lieu si la source de la blessure, c’est-à-dire la violence, est toujours présente. Lorsqu’une personne est constamment blessée à nouveau, elle ne peut entamer une véritable guérison, car elle mobilise toutes ses ressources mentales, émotionnelles et physiques pour survivre plutôt que pour se réparer. Face à une violence continue, l’énergie se concentre sur la protection, l’adaptation et la gestion de la crise, laissant peu de place à une guérison durable.

La guérison est un processus long et unique à chaque personne et situation. Elle peut inclure plusieurs dimensions :

  • Transformer la relation avec soi-même : Il s’agit de retrouver son intégrité en ré-intégrant les parties de soi que l’on a parfois dû mettre de côté, nier ou dévaloriser pour survivre à des traumatismes. Guérir, c’est développer la capacité à se traiter avec compassion et à accepter toutes les facettes de soi, en apaisant les sentiments de honte, de haine de soi et de jugement.   

  • Rétablir un sentiment de sécurité: Retrouver un sentiment de sécurité dans son corps, avec les autres et dans son environnement. Dans des contextes d’oppressions systémiques ou de violence institutionnelle, cela peut passer par la création d’espaces plus sûrs, en s’entourant de pairs ou d’allié-es. Pour les personnes confrontées à des violences comme le racisme ou la trans-misogynie, il s’agit parfois de trouver des îlots de sécurité là où fuir totalement la violence n’est pas possible, l’idéal étant d’avoir le soutien nécessaire pour quitter ces environnements violents. 

  • Transformer notre rapport à la douleur : Les blessures ne disparaissent pas toujours, mais la guérison nous permet d’avoir plus d’espace pour les contenir sans en être submergé-e. La douleur émotionnelle devient moins intense, plus courte et moins fréquente au fil du temps. 

  • Développer une présence à soi et aux autres. Cela signifie être capable de ressentir et d’identifier nos émotions et sensations, qu’elles soient agréables ou difficiles, et de mieux accueillir le vécu des autres. Cela inclut aussi la capacité à réparer les ruptures dans la relation à soi-même et aux autres, en rétablissant la confiance et la sécurité. Cela permet de créer des connexions plus profondes et significatives avec notre entourage.

  • Renforcer la capacité à s’exprimer. Apprendre à formuler clairement ses besoins et ses désirs, poser des limites et les défendre, favorise des relations plus authentiques. Mieux s’exprimer renforce également le sentiment d’autonomie et aide à prévenir de futures violences.

  • Identifier et honorer ses besoins : Pour guérir, il est essentiel d’apprendre à écouter son intuition et à faire des choix alignés avec son bien-être, sans se sacrifier ni s’effacer. Cela ne doit pas être perçu comme un acte égoïste, mais comme une manière de s’assurer que nos actions nourrissent réellement notre équilibre intérieur. 

    • Note : Trouver cet équilibre est un art qui se pratique en relation, car notre bien être est lié à celui de la communauté. L’idée est d’harmoniser nos besoins avec ceux des autres, sans s’épuiser ou se nier, pour éviter le ressentiment et favoriser des dynamiques relationnelles saines. Cultiver cet équilibre rend possible la guérison personnelle et collective, renforçant la résilience et l'harmonie communautaire. 

  • Prendre le contrôle de sa vie : Sortir de la réactivité, augmenter sa réflexivité et renégocier les traumatismes passés en libérant l’énergie de survie emmagasinée dans le corps, permettent de faire des choix éclairés, en accord avec nos valeurs et aspirations. Ces choix deviennent une affirmation de notre intégrité et de notre engagement à vivre de manière authentique.

  • Entretenir des relations nourrissantes : S’engager dans des relations mutuellement épanouissantes, basées sur la compréhension, le soutien et la bienveillance, où chacun-e est valorisé-e et respecté-e dans son authenticité, permet de bâtir des communautés interconnectées où chacun-e se sent à sa place.

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